Lors de l'application, au 1er janvier 2005, des dispositions sur le nom de famille, les officiers d'état civil n'avaient eu que quelques jours pour prendre connaissance d'une circulaire de plus de cent pages. Les années passent et, malheureusement, les mauvaises habitudes persistent. C'est la veille de l'entrée en vigueur de la réforme de la filiation, le 1er juillet dernier, que le ministère de la Justice a publié la circulaire précisant la mise en oeuvre du texte. Les officiers d'état civil sont une nouvelle fois exaspérés.
A ce jour encore, nombre d'entre eux se posent des questions sur les conséquences de l'ordonnance du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation. Prenant acte de l'augmentation sensible du nombre des naissances hors mariage qui représentent aujourd'hui plus de 40% du total des naissances, le gouvernement a définitivement supprimé la distinction entre enfants légitimes et enfants naturels présente dans le Code civil depuis 1804. Dans un souci d'égalité et de simplification du droit, les règles fixées pour l'établissement de la filiation sont modifiées au profit de la mère qui désormais ne sera plus contrainte de déclarer son enfant à la naissance. "En supprimant une formalité mal comprise", cette mesure "évitera qu'une proportion non-négligeable d'enfants n'ait pas de filiation maternelle établie avec certitude, par simple méconnaissance de la loi", indique le rapport sur l'ordonnance du 4 juillet 2005 que le ministère de la Justice a remis au président de la République.
Si elle simplifie les dispositions du Code civil relatives à la filiation, les réduisant de moitié en volume, la réforme n'est pas une révolution. "Sa mise en oeuvre intervient dans la continuité des réformes déjà engagées concernant l'autorité parentale (loi du 4 mars 2002) et le nom de famille (loi du 4 mars 2002 modifiée par la loi du 18 juin 2003)", souligne Marie-France Marnet, directrice du service de la population à Sainte-Geneviève-des-Bois (Essonne).
Conséquence directe de cette réforme : depuis le 1er juillet, un nouveau modèle de livret de famille est offert aux mariés et aux jeunes parents. Ce livret est le même pour tous, que les titulaires soient des parents naturels, des parents adoptifs ou des personnes mariées civilement. L'arrêté du 1er juin 2006 (Journal officiel du 2 juin 2006) en fait la description.
Un livret évolutif
Marie-France Marnet résume : "Le nouveau livret est un collationnement des actes de l'état civil." On y trouve les extraits d'acte de naissance des parents, de mariage, etc. En conséquence, "le livret de famille devient évolutif, remarque Dominique Deurweilher, responsable de l'état civil et des services à la population à la mairie du Havre. Les parents qui vivent en concubinage et qui, par la suite se marient, gardent le même livret."
Les communes pourront délivrer les anciens livrets de famille jusqu'au 31 décembre 2006. Le ministère de la Justice a accordé cette prolongation par un arrêté du 27 juin. A Créteil, on juge le sursis amplement suffisant et les nouveaux livrets ont déjà été commandés. A Grenoble cependant, la mairie possède encore un stock de 750 livrets de famille et de 800 duplicata. Bien plus qu'il n'en faut pour les six prochains mois.
La réforme de la filiation ne fait pas seule l'actualité de l'état civil. Les communes qui doivent maintenant "digérer" la réforme de la filiation, devront aussi prendre en compte le nouvel acte de naissance. Dans sa forme, il sera le même partout en France.
Face à ces changements en série, les services de l'état civil sont contraints d'adapter leurs méthodes de travail. Marie-France Marnet constate : "L'application de la réforme du nom de famille a impulsé une nouvelle dynamique. Les services se sont penchés sur les textes, alors que prévalaient les habitudes de travail. Ils ont notamment renforcé le travail en réseau entre les collectivités."
Thomas Beurey / EVS Conseil
Les principaux points de la réforme de la filiation
La mère non-mariée n'a plus à procéder à la reconnaissance de l'enfant dont elle a accouché. Une simple indication du nom de la mère dans l'acte de naissance suffira à établir la filiation. Cependant, la mère pourra toujours reconnaître l'enfant, éventuellement avant la naissance. Cette reconnaissance prénatale peut être prépondérante pour l'attribution du nom de l'enfant, dans la mesure où le principe selon lequel l'enfant prend le nom du parent qui l'a reconnu en premier s'applique comme précédemment.
Les règles existantes pour l'établissement de la paternité ne changent pas. Au mari, lié à sa femme par une obligation de fidélité, reste attachée la notion de présomption de paternité. Quant aux pères non-mariés, ils devront toujours procéder à une démarche de reconnaissance pour que la filiation soit établie à l'égard de leur enfant.
Le principe de l'unité du nom au sein de la fratrie est renforcé. Avec la réforme de la filiation, les enfants d'un même couple devront porter un seul et même nom. La réforme du nom de famille poursuivait déjà cet objectif, sans pouvoir l'atteindre complètement. Désormais, le nom du premier enfant commun au couple (c'est-à-dire "l'enfant à l'égard duquel le double lien de filiation paternel et maternel est établi" précise la circulaire du 30 juin) est dévolu de façon automatique aux autres enfants du même couple.
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